Pour conclure cette série d’épisodes autour de la crise et de sa sortie, faisons un tour de voile en mer. Lorsque votre bateau est réglé de manière idéale, il se met en résonance et vous pouvez entendre le bruit sourd mais agréable de cette résonance quand la coque et le grément se mettent à chanter les louanges de votre réglage et de votre conduite. En fonction du vent, du courant et de votre destination choisie, vous avez trouvé la combinaison qui donne la vitesse maximum à votre bateau dans les conditions changeantes de votre navigation.
Pour qu’un dirigeant soit extraordinaire – et par ricochet que son entreprise délivre des conditions et des résultats extraordinaires – il doit sans cesse ajuster le réglage et le cap de son entreprise en fonction de son environnement externe. Entre deux régates, il faut sanctionner, renvoyer à l’entraînement, changer les maillons faibles de l’équipage, accroître les compétences des autres.
Vous connaissez cette contrainte de la réussite, vous la ressentez bien. Dans le mode de fonctionnement d’avant crise, vous aviez à cœur de responsabiliser et de déléguer autour de vous. Comme le skipper d’un voilier responsabilise ses équipiers, auxquels il délègue l’essentiel des réglages.
Pour un voilier, comme une entreprise, le réglage idéal aboutit à une mise en résonance. Plus le bateau est grand et l’équipage est nombreux, plus le capitaine du navire se transforme en chef d’orchestre. Il va utiliser tous ses sens, rationaliser son intuition et orchestrer avec finesse et rigueur la synchronisation des équipes. Il exerce son leadership : il prend les décisions structurantes, les fait mettre en application immédiate, pilote et ajuste réglages et cap en permanence ; il maîtrise son équipage. Le navire entre en pleine puissance et peut entrer en résonance ; tout l’équipage s’en rend compte et s’approprie une petite partie du succès.
Les entreprises, elles, ne sont quasiment jamais en résonance. Elles gaspillent trop d’énergie, et elles ont souvent un déficit d’exécution opérationnel, de discipline opérationnelle. Les entreprises ont un handicap par rapport à un voilier qui régate : tous les managers et collaborateurs ne sont pas à bord uniquement par passion. Et c’est le challenge entre vos mains sur les prochaines semaines. Que faire face à trop de lenteur, trop d’inertie, trop de nombrilisme, trop de tergiversations, trop de non-décisions, trop de non mises en application, trop de règles et d’engagements non respectés et tout le monde s’en moque, trop de penser à l’envers, trop de rien ? Trop c’est trop ! Rien n’est inéluctable, tout repose sur vous et votre leadership.
Vous devez reprendre le plein contrôle de votre entreprise, même si cela créera un flottement ou des frustrations avec vos managers. Ils auront l’impression d’une régression, et ils auront raison. Mais le plus important est de faire réussir votre entreprise, la reconfigurer et créer une nouvelle orchestration. Seuls les systèmes résonants accumulent de l’énergie plutôt que d’en gaspiller.
Votre « TO DO LIST » :
Derrière la résonance, nous trouvons toujours la durée et l’intensité d’une action, quelque chose qui fait vibrer l’esprit et/ou le cœur. Ce sera facile pour les passionnés.
Pour les autres, Hartmut Rosa propose 4 critères pour qu’ils soient acteurs de la résonance : ils doivent se sentir en mesure de trouver une réponse assez rapide à leurs interrogations (auto-efficacité), ils doivent sentir que les passionnés apportent du neuf (innovation et créativité, à la place du stakhanovisme), ils doivent être surpris (déçus en bien pour reprendre une expression romande), ils doivent être sensibilisés à la contagion (affection sensible).
Vos dimensions de leadership restent inchangées :
Prenez du plaisir à créer des résonances horizontales (aplatissez votre organisation pour que chacun les ressente quand elles se produisent), des résonances verticales (changez le mode de fonctionnement de vos managers dans un souci d’accélération), et des résonances diagonales (soyez une nouvelle force de proposition auprès de vos clients et partenaires).