[Article] Gestion de crise : la vigilance productive

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En sortie de crise, les possibilités sont nombreuses. Un esprit positif, orienté action, est absolument nécessaire, mais il ne suffira pas. En ce moment, vos capacités à entraîner de nouveau votre entreprise sur la bonne voie et le bon tempo sont en train de se jouer. En particulier, comment éviter de se retrouver coincé dans une approche unique – en mode tout ou rien – sur ses habitudes, qui s’apparenterait à un banco sans filet de protection.

Après avoir vu comment mieux cibler ses actions et comment mettre en place les initiatives très rapidement, faisons un pas de côté.

Quels sont les garde-fous à mettre en place pour ne pas se faire piéger par une myopie contagieuse ou par un excès de confiance mal placé ?

Rester serein avec un sentiment d’urgence permanent

Avoir les moyens de la réussite, c’est maîtriser deux leviers d’action directe pour votre entreprise : le cash et les hommes. Une vigilance productive consiste à maintenir suffisamment de cash pour se donner les moyens d’actions derrière chacune de ses idées, et à développer et enrichir le potentiel humain de l’entreprise en permanence (expériences, formations, expérimentations …).

En période de crise, cette nécessité du cash est prégnante pour maintenir l’emploi et préparer le lendemain – mais plutôt difficile à concilier avec les ralentissements de paiements et de création de chiffre d’affaires. L’impératif des premières semaines de crises a été d’avoir un pilote vigilant et dédié pour exploiter toutes les sources de cash possibles. Car son obtention est très chronophage en période de crise où beaucoup de processus internes sont figés. Une partie de votre cash est prisonnier des opérations.

La conversion de ce cash opérationnel impose de dialoguer avec vos clients, de facturer avec leur accord, de solder les encours clients, etc., mais aussi de réduire les dépenses superflues avec beaucoup de tact. L’obtention du cash hors opérations (aide, prêts, …) exige encore plus d’efforts et de suivi. Pas de scrupule à avoir, tout le monde est logé à la même enseigne ; seules l’intensité et l’opiniâtreté comptent.

Les entreprises qui se préparent le mieux pour la sortie de crise ont mis en place un « ayatollah éclairé » du cash : doté d’une énergie sans faille pour en obtenir, avec toutes les subtilités et compromis nécessaires pour le respect de la réputation de l’entreprise, de ses valeurs et de ses engagements.

Suivre les prises de risques et mettre des stratégies d’anticipation en place

Avoir une gestion du risque, en temps de crise, c’est permettre à l’entreprise d’éviter de se retrouver dans une position catastrophique. Certes, vous devez prendre des risques, mais vous avez aussi le choix des stratégies et de vos audaces.

Toujours en croisant les analyses de Collins et Hansen avec nos accompagnements, trois recommandations en termes de risques et de leur gestion : 

  • Il existe des risques qui ne valent pas la peine d’être pris en temps de crise, aussi séduisants et prometteurs soient-il. Si un risque pris va imposer une grosse perte à l’entreprise en cas d’échec, mieux vaut s’abstenir et repenser son action avant de l’engager. De même, certaines actions peuvent avoir un gain dérisoire au regard de l’effet négatif du risque s’il se concrétise. Elles sont à proscrire.
  • Les risques pour lesquels vous n’avez pas encore identifié une stratégie de contournement (risques incontrôlables) méritent une attention prioritaire. Quelles sont les idées à mettre en place autour de cette action risquée, pour borner et limiter l’impact du risque ? Envisager le pire pour mieux l’anticiper et ajuster.
  • Le risque temps nécessite l’attention renforcée. L’absence ou la lenteur de prises de décisions face à une opportunité, voire la lenteur de la mise en place ou de l’application de ces décisions, ou à l’inverse l’excès de rapidité de mise en place d’une décision peuvent plomber rapidement les résultats de l‘entreprise. Le point commun des entreprises qui réussissent leurs sorties de difficultés est un dirigeant qui ne délègue pas le suivi du risque temps. Cela veut dire se rendre disponible et être capable de lire la probabilité des changements de profils de risques au fur et à mesure de la mise en place d’actions plus ou moins risquées.

Néanmoins, ce pilotage du risque ne dispense pas d’encourager les équipes à prendre des actions rapidement pour éviter que la frustration de l’incertitude et/ou que l’anxiété des risques ralentissent l’avancée de l’entreprise.

Regarder autrement, prendre de la hauteur

Partager le schéma visuel de vos trajectoires, présenter une succession temporelle des initiatives prises pendant la crise, et se préparer à mieux rebondir après. Votre communication fréquente doit pousser à l’extrême vos capacités d’abstraction et de simplification des idées complexes. Vous devez réunir et souder votre équipe pour qu’elle se focalise sur des intérêts convergents, que vous devez construire ensemble. Tout bruit de fond et manque d’engagement sont des obstacles suicidaires pour l’entreprise.

Prendre de la hauteur, c’est plus que jamais être sans complaisance pour le manque de respect des engagements pris par vos collaborateurs proches. Certaines décisions / actions suscitent l’enthousiasme et la mobilisation naturelle des énergies internes pour avancer rapidement. Jusqu’ici tout va bien ! La plupart des décisions / actions, au contraire, vont ébranler la routine managériale de vos collaborateurs et favoriser au mieux la lenteur d’exécution, au pire l’échec du portefeuille d’initiatives et son équilibre.

Voilà le deuxième virus à combattre et à éradiquer rapidement. Ces « plaques de verglas » (« ce n’est pas de ma faute, j’ai dérapé à cause de… ») sont un ennemi léthal d’une bonne sortie de crise. Vous ne pouvez plus tolérer le moindre manque d’alignement collectif.

Une fois cet alignement fait sur un objectif plus élevé que les soucis individuels, vous devez être hyper vigilant aux changements de conditions qui valident ou invalident les options des trajectoires choisies ou des initiatives mises en place. Il en va de la confiance et de l’assiduité de votre équipe et de vos collaborateurs.

C’est le rôle du dirigeant de savoir reconnaître lorsqu’un événement externe impactant se produit et que celui-ci impose des actions de rupture par rapport à ce qui avait été décidé, ou des changements d’intensité dans l’exécution opérationnelle.

Les sorties de crise sont très volatiles et il faut prendre suffisamment de recul pour ne pas se laisser surprendre par des événements indésirables. Si ceux-ci se produisent, vos équipes doivent avoir la capacité et l’énergie de retour en arrière (apprendre de l’escarmouche) ou de revenir sur une décision prise (reconfigurer l’action).

RDV au prochain épisode : préparer sa sortie de crise.

Patrick BUFFET

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